Le déconfinement et la reprise induite sont pour beaucoup d’entreprises marqués par l’apparition de nouvelles sources de tensions internes : appréhension du retour au bureau après plusieurs semaines chez soi, doutes quant à la volonté des directions de faire évoluer le rythme de travail, craintes sur la capacité d’assurer durablement la sécurité des collaborateurs, anxiété quant à la pérennité des activités, etc.

L’ensemble de ces changements peut induire un enchaînement de crises voire une crise sans fin. En effet, du fait du caractère stratégique pour les entreprises de cette phase de relance, ces tensions peuvent rapidement dépasser les simples bruits de couloir pour devenir elles-mêmes des générateurs de crises dans la crise : fuite des talents, baisse de vigilance face au risque cyber, troubles à la réputation, mouvements sociaux, actes de malveillance, etc. Il est alors essentiel de pouvoir comprendre le ressenti et les attentes des collaborateurs.

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Dans ce contexte, il est indispensable pour favoriser une relance efficace de bâtir des fondations solides en recréant de la sérénité au sein des entreprises. Pour ce faire, les décideurs se doivent certes de garder une posture d’exemplarité mais surtout de porter un regard en arrière au travers d’un réel retour d’expérience et ce, avant même de penser au jour d’après.

Sur le sujet du retour d’expérience, deux questions reviennent souvent : Pourquoi faire un retour d’expérience ?" et "quand faire ce retour d’expérience sachant que la crise n’est pas réellement terminée ?". La pandémie du Covid-19 a profondément bousculé la colonne vertébrale des entreprises d’où la nécessité de tirer des enseignements sur ce qui a été fait, en bien et en mal, qu’elles aient activées ou non leur cellule de crise. De plus, la cinétique lente de cette crise fait que l’immensité des informations, recueillies ou non, depuis plusieurs mois risque jour après jour d’être oubliée d’où l’intérêt de faire ce retour d’expérience dès à présent.

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La question du "qui ?" est aussi fondamentale car il ne faut pas perdre de vue que chacun a une perception différente de la crise. Le caractère inédit de cette crise fait que le retour d’expérience se doit d’être réalisé de manière globale et ce à quatre niveaux : celui des membres de la cellule de crise pour améliorer les méthodes et l’organisation, celui des décideurs afin de ressouder les équipes en vue de la reprise de septembre, celui des collaborateurs afin de les rassurer, et de détecter les signaux faibles et enfin celui des partenaires et parties prenantes externes afin de régénérer de la confiance et de la stabilité au sein de la chaîne de valeur. Pour ce qui est du "comment ?", il est avant tout nécessaire de choisir pour chaque population le bon mode d’action et de travailler avec méthode : sondages, entretiens individuels, ateliers collectifs, restitutions, etc.

Cet exercice d’introspection représente cependant des risques car il pourra faire ressurgir des tensions vécues au sein même des équipes et de l’écosystème de l’entreprise. Ainsi, il est indispensable d’aborder le retour d’expérience avec humilité (il est toujours possible de faire mieux lors d’une crise), avec objectivité (certains acteurs peineront à être juge de leurs propres actions et à dépasser leur simple vécu) et de manière constructive (l’objectif n’est pas de dire qui a mal fait mais d’avancer ensemble pour faire mieux).

Au-delà de dresser les forces et les axes d’amélioration, il faut avant tout favoriser l’adhésion de tous. Les différentes parties prenantes doivent pouvoir se projeter dans une démarche d’amélioration continue concrète et cadencée. Une communication transparente et adaptée aux différents publics est alors essentielle : le recours à des relais internes (ex. CSE) et externes (ex. associations de professionnels) pour s’assurer de la pérennité des actions correctives entreprises ne peut être que vivement conseillé.

La remise en question intrinsèque au retour d’expérience débloquera les freins possibles à l’évolution et permettra de favoriser le contact entre le manager et l’équipe en valorisant les talents de chacun. L’égo étant un facteur à ne pas sous-estimer, le recours à des facilitateurs neutres voire externes aidera à sortir de l’effet tunnel de la crise.

Suite aux bouleversements générés par le Covid-19, chaque collaborateur de l’entreprise a naturellement besoin de retrouver sa place au sein de l’organisation et une confiance réciproque avec sa hiérarchie pour affronter de possibles crises à venir. Ainsi le retour d’expérience permettra de limiter l’impact des irritants accumulés depuis le confinement en appréhendant précisément ce qui est redouté dans l’entreprise et les signes avant-coureurs à détecter, en formalisant la façon de se prémunir des futures crises et ainsi de comprendre comment dessiner le monde d’après.

source : https://www.journaldunet.com/management/direction-generale/1492471-reprise-evitez-les-crises-dans-la-crise/